Le 17 octobre
Nous prenons le bus vers Phnom-Penh, passons la frontière sans encombres et les doux bras du Mekong laissent place aux grandes étendues de rizières et vaches dans les champs. On voit aussi que le Cambodge paraît plus pauvre: les routes en terre, les détritus un peu partout.
On arrive à la capitale après 5h de trajet, et on prend un tuktuk pour aller jusqu’à l’auberge. On se rendra compte plus tard qu’on est censés être 3 max dans ce tuktuk, mais même avec les sacs, we did it ! On croise toujours des scooters aussi blindés (oui oui, entre les légumes on a encore la place de glisser une personne 😉 )
En soirée, on cherche longuement où manger et on finit par tomber sur le nightmarket: ici tout le monde mange à même le sol sur des nattes, au milieu des stands et d’une scène avec de la musique. C’est très convivial !
Le lendemain, on décide d’aller au temple Wat Ounalom, c’est super joli ! L’architecture des temples est particulière: beaucoup de dorures, des espèces de « bras » en haut des toits.
Un guide nous accoste pour nous vendre un tour. Au début nous sommes un peu réticents, il nous propose des visites différentes alors on se laisse porter et on part avec Sokun. Et on est pas déçus !
Voilà la legende urbaine qu’il nous raconte :
Il y a longtemps, la capitale Chaktomuk était endommagée tous les ans au moment des crues. Un jour, un énorme arbre s’est deplacé dans le Mekong et est venu se bloquer à la base d’une colline. Une femme instruite nommée Lady Penh a découvert cet arbre rempli de statuettes de buddhas en or et en argent et y a vu un signe. Elle a donc eu l’idée de replanter l’arbre en haut de la colline. Les villageois se sont déplacés là-bas et on été a l’abri des crues suivantes, le roi a donc decidé de deplacer la capitale à cet endroit et de l’appeler Phnom-Penh (« Phnom » pour la colline, et Penh pour Lady Penh).
On visite un temple juste à côté de l’ancien palais, et on peut apercevoir un peu l’intérieur de l’ancien palais qui est normalement interdit aux visites.
On apprend que les serpents à plusieurs têtes présents à presques toutes les entrées de temples sont des « Naga », ils gardent les temples pour que personne ne vienne troubler la méditation des bouddhistes.
On continue vers un autre temple qui est une reconstitution du bateau sur lequel le roi a voyagé quand il a deplacé la capitale de Siem-reap à Phnom-Penh. Et on passe devant un arbre de 478 ans !!
Sokun nous emmène dans le quartier Cham, un quartier musulman assez pauvre. Il nous dit de descendre pour aller voir leurs maisons au bord de l’eau, mais de suite des enfants viennent mendier au bord du tuktuk. Il nous invite à continuer, à aller en voir un peu plus mais nous sommes très mal à l’aise. Nous avons l’impression de rentrer chez quelqu’un, de venir exposer nos « richesses » de touristes à la vue des gens les plus pauvres. Nous décidons de ne pas aller plus loin et de remonter dans le tuktuk. 100m plus loin nous passons à coté de belles maisons, il nous explique que c’est principalement les membres du gouvernement qui résident là. Juste à côté des maisons des Chams, ça nous laisse un goût un peu amer…
On finit la visite sur un temple laissé à l’abandon, que le roi avait construit pour que son fils aille prier. On voit plein de singes, Sokun nous donne des bananes et des gâteaux à leur donner. Ils sont très affectueux !!
On finit cette journée par une visite assez dure: le musée du génocide S-21. C’est une ancienne prison tenue par les Khmers rouges sous le joug de Pol Pot, dans laquelle ils torturaient leurs prisonniers jusqu’à avoir des aveux (souvent pour des choses qu’ils n’avaient pas faites) pour ensuite les envoyer se faire tuer dans d’autres camps. Ce musée est construit dans la prison elle-même, on peut voir les salles et instruments de tortures, ce qui rend la visite encore plus pesante… Sur 12000 a 20000 prisionniers, seuls 12 ont survécu.
Mais qui étaient ces prisonniers ? Principalement les personnes avec un certain niveau d’éducation, pour justement éviter qu’ils comprennent ce qui se passe et mettent en place une révolution pour renverser le régime. Nous avons été choqués de voir à quel point tout ça a pu continuer pendant 4 années sous les yeux du monde. La Suède a envoyé une délégation au début du régime Khmer sur invitation de ce dernier. Des années après, le président de la délégation ne s’explique toujours pas comment ils ont pu se faire berner à ce point (au point même qu’en revenant ils appuyaient pour dire que tous les doutes étaient faux et qu’ils soutenaient Pol Pot).
À la manière d’Auschwitz, ces lieux et visites peuvent aider à comprendre comment ce genre d’atrocité a pu avoir lieu et ne jamais les reproduire.
Nous nous posions pas mal de questions au sujet de notre future visite de la Birmanie. En effet à l’heure actuelle de fortes suspicions d’épurations ethniques planent sur ce pays. Déportation de population, camp de travail, de torture et d’extermination… Face à ça, ce pays semble l’un des plus beaux du monde et les gens présents sont décrits comme les plus souriants et gentils. Nous nous sommes alors retrouvés devant un dilemme immense, le pire et le meilleur …
Après discussions, visite de S21, réflexion et recherches, nous avons pris la décision de ne pas entrer en Birmanie. Les raisons en sont simples, nous refusons de fermer les yeux sur des crimes contre l’humanité (ne serait-ce que suspectés), d’être des témoins et des outils de propagande passifs (en effet, vous poster de superbes photos de Birmanie n’avancera pas une prise de conscience internationale). Ce paragraphe n’a pas pour but de lancer une polémique mais juste de vous expliquer nos avis et nos choix.
Pour conclure : une phrase du musée S21 nous a heurté. Elle disait (en substance) :
Des tragédies de notre histoire, aussi nombreuses soient-elles, Darfur, Rwanda, Khmers rouges, Arménie, holocauste, et bien d’autres, ne peuvent se reproduire que parce la communauté internationale et nous-même acceptons de fermer les yeux. Combien de temps nous faudra-t-il pour les ouvrir ?
On part vers Kampot, goûter le meilleur poivre du monde !
je comprends vos décisions pour la Birmanie.
Les expériences restent superbes et agréables à voir
Bonne continuation pour la suite de vos pérégrinations
plein de bisous